Par-delà les projecteurs et les écrans, il y a des hommes discrets, mais essentiels, qui façonnent l’âme du cinéma et de la télévision. Bitjoka Bondol Mbock est de ceux-là. Producteur, réalisateur, enseignant et formateur aux métiers de l’audiovisuel, il a fait de l’image un langage, de la transmission un devoir, et de la culture un engagement.
Né avec le rêve d’être architecte, Bitjoka entame pourtant ses études supérieures en Allemagne dans le domaine de l’ingénierie des télécommunications, avant de poursuivre en France, dans les réseaux télécoms. Mais rapidement, l’appel de l’art se fait plus fort. “C’est pour confirmer mon identité bantu et mon amour pour l’art que j’ai abandonné les télécommunications”, aime-t-il confier. Une reconversion audacieuse, guidée par l’intuition que sa place était ailleurs : derrière une caméra, au cœur de la création. Formé comme assistant réalisateur en cinéma et télévision, Bitjoka débute à France Ô, où il gravit les échelons jusqu’à la direction des antennes au service de production. Il y réalise de nombreux spots et émissions pour le réseau France Télévisions outre-mer.
Parmi ses œuvres marquantes figurent La Famille Salsa, avec Nino Vasquez, le “Pape” de la salsa, L’Esprit de Jenny, hommage vibrant à Jenny Alpha présenté au Festival d’Avignon, ou encore L’Afrique noire à l’image, réflexion poignante sur la représentation des Africains dans les médias. Il signe également Tara, et collabore avec JPS Production pour la réalisation de clips vidéo, tout en développant des projets de documentaires pour ZDF, ARTE ou M6. Curieux insatiable, Bitjoka ne se contente pas de tourner. Il analyse. Il expérimente. Il questionne. Il se plonge dans l’étude de la colorimétrie, explore le cinéma post-colonial et soutient une thèse sur Trafic de Jacques Tati. Aux côtés du professeur Khoepner, ex-directeur de la célèbre école de cinéma de Berlin, il coécrit un ouvrage sur les situations standards du cinéma.
Loin des cloisons académiques, il s’intéresse aussi à la théologie, l’histoire, la psychanalyse, l’ethnologie autant de disciplines qui nourrissent sa vision du monde et de l’image. La maladie, survenue de manière brutale, l’éloigne des plateaux pendant près de dix ans. Mais pas de la passion. Il devient formateur, intervenant dans les filières du cinéma, et participe activement aux journées de réflexion sur la production audiovisuelle organisées par l’UNESCO. Il s’engage aussi au sein du Réseau Africain des Promoteurs d’Événements Culturels (RAPEC), convaincu que l’Afrique doit bâtir son propre écosystème culturel. Il collabore étroitement avec le producteur François Marthy (À la Prod) et accompagne, aux côtés du professeur Philippe Brunet, la troupe Demodocos de la Sorbonne dans ses représentations à travers la France.
À un moment charnière de sa carrière, il signe un contrat avec une fondation suisse pour la production d’un long métrage. Un projet interrompu par la maladie, mais jamais abandonné. Derrière son allure simple, parfois négligée, se cache un esprit brillant, un homme de paix, un humaniste sincère. Bitjoka Bondol Mbock préfère murmurer dans l’ombre que briller à tout prix. Il est de ces passeurs qui éclairent les chemins sans jamais chercher à être au centre de la scène. Toujours prêt à tendre la main, à secourir, à transmettre. Aujourd’hui encore, c’est avec la même humilité et le même amour du métier qu’il accepte de partager son expérience. Non pas pour se raconter, mais pour inspirer. Pour rappeler que derrière chaque image, il y a une vision. Derrière chaque parcours, une vocation. Et derrière chaque silence, une œuvre en devenir.