Elles sont jeunes, parfois étudiantes ou en quête d’ascension sociale, et n’hésitent pas à frapper à la porte des marabouts. Objectif : « attacher » un homme pour le rendre amoureux ou l’inciter à délier les cordons de sa bourse.
Dans certains quartiers de Yaoundé, cette pratique alimente conversations, rumeurs et parfois désillusions. « J’ai dépensé près de 50 000 Fcfa pour un rituel. On m’a donné une espèce de liquide à mettre dans son repas. Au début, ça marchait, il était plus attentionné, plus généreux. Mais après quelques mois, il a tout découvert et m’a quittée », confie anonymement une jeune dame de 28 ans, la voix basse. Pour elle, comme pour d’autres, la magie semblait la solution la plus rapide pour sécuriser une relation jugée fragile.
Chez les hommes, certains affirment avoir senti le piège. « Avec mon ex, je ne comprenais pas pourquoi je ne pouvais pas m’en détacher. Je rêvais d’elle toutes les nuits, même quand elle me maltraitait. Quand j’ai consulté un pasteur, il m’a dit qu’elle avait utilisé des fétiches », raconte Aymard, 31 ans. Selon lui, la rupture n’a été possible qu’après des prières intenses. Pourquoi ce recours aux marabouts ?
Selon des sociologues, la peur d’être abandonnée, la pression sociale à garder son homme et l’attrait du confort matériel jouent un rôle majeur. Dans un contexte où l’argent devient souvent un critère déterminant dans les relations amoureuses, certaines jeunes femmes préfèrent miser sur des rituels censés garantir fidélité et prospérité.
Mais la médaille a son revers. Des filles reconnaissent avoir subi des contrecoups: sentiment de dépendance, échec du rituel, voire rejet brutal de l’homme visé. « On croit forcer l’amour, mais au final on se fait plus de mal », admet Fabiola, 29 ans, aujourd’hui décidée à tourner la page. Au fond, ces potions magiques ne disent pas seulement quelque chose de l’amour. Elles révèlent aussi des insécurités affectives et économiques, dans une société où séduire ne suffit plus toujours à garder l’autre.