Ce 19 août 2025, le monde célèbre la photographie. À Yaoundé, toutefois, les acteurs de ce noble art peinent encore à tirer pleinement profit de leur activité, contrairement à ce qui s’observe sous d’autres cieux.
Assise à son bureau avec un petit gâteau posé devant elle pour son anniversaire, Léa sourit face à l’écran de son smartphone. En un clic, elle se filme et partage la photo sur son statut WhatsApp. Autrefois, la scène aurait été bien différente. On se serait rendu dans un studio photo où il aurait fallu patienter longuement. Les murs tapissés de papier peint auraient offert un choix de fonds variés : jardin fleuri, traineau du Père Noël, tour Eiffel… chacun aurait choisi le décor qui marquerait son souvenir. Aujourd’hui, la facilité et l’instantanéité du smartphone et autres outils de prise de vue semblent avoir remplacé ces rituels d’antan.
La réponse est nuancée : « Grâce aux smartphones, tout le monde peut aujourd’hui prendre des photos facilement, les retoucher et les partager instantanément », explique Berti Berthold, photographe amateur. Ce qui autrefois nécessitait un studio ou un appareil professionnel est désormais accessible à tous. Les selfies dominent désormais les réseaux sociaux, et beaucoup de jeunes se passent volontiers des services d’un studio. Pourtant, certains usages restent indétrônables. « Au mariage, mon mari voulait que ses cousins prennent les photos avec leurs téléphones pour ne pas dépenser », raconte Hawa Dedali. « Mais au final, seules celles du photographe ont fini encadrées. Les autres, quand on a voulu les agrandir, étaient floues. » Même constat chez des jeunes étudiants : difficile d’imaginer envoyer une candidature avec un selfie. Beaucoup se tournent vers les studios avec le fameux « drap blanc » en fond pour obtenir des portraits professionnels adaptés à un CV.
Jean-Claude Messa, photographe et propriétaire d’un studio à Santa Barbara, confirme : « La lumière, le cadrage et la netteté sont des détails que le téléphone ne peut pas toujours offrir. Chaque photo est pensée pour sublimer la personne et durer dans le temps. Même quand la photo est abîmée elle est toujours récupérable. » Mais le métier semble aujourd’hui moins lucratif : « Quand j’ai ouvert en 2006, je recevais environs dix clients par jour. Aujourd’hui, parfois à peine quatre. Sans les marchés que je gagne dans les événements, je peux me retrouver avec 20 000 francs de recette en trois ou quatre jours. » Pour compenser la baisse de fréquentation, il diversifie ses services : impression de documents, shooting à thème (anniversaire, mariage etc), cadres personnalisés, retouches numériques, voire location de matériel photo. Ainsi, si les studios ne semblent plus indispensables pour immortaliser chaque moment de la vie quotidienne, ils restent pertinents pour ceux qui recherchent des souvenirs de qualité. Leur survie passe par la capacité à s’adapter aux nouvelles habitudes et à proposer des expériences que le smartphone ne peut pas reproduire.