Malgré une interdiction claire, la vente des manuels scolaires au sein des établissements continue de prospérer, en toute illégalité, dans de nombreuses écoles du Cameroun.
La loi camerounaise est pourtant formelle. La loi N°2021/024 du 16 décembre 2021 régissant l’activité du livre et de l’industrie du livre scolaire au Cameroun interdit strictement la vente des manuels scolaires dans les établissements. Elle stipule que seules les librairies agréées sont autorisées à commercialiser les ouvrages scolaires, en magasin ou en ligne.
L’objectif de cette loi est de garantir la transparence, protéger les parents contre les abus et organiser une filière du livre équitable. Le ministère du Commerce, en partenariat avec celui de l’Éducation de base et des Enseignements secondaires, a plusieurs fois rappelé cette interdiction, insistant sur les sanctions prévues pour les contrevenants.
Les chefs d’établissement pris en flagrant délit de vente de livres s’exposent à des peines allant de un à cinq ans de prison, et à des amendes pouvant atteindre 5 millions de FCFA.
Un commerce juteux difficile à éradiquer
Mais sur le terrain, la réalité est tout autre. Dans de nombreux établissements privés, surtout du cycle primaire, l’achat des manuels scolaires est intégré au processus d’inscription. Certains imposent des “packs de livres” vendus directement dans les bureaux administratifs ou par des libraires recommandés, qui viennent livrer dans les écoles.
Le refus de l’achat peut entraîner des pressions sur les parents. Ce système représente une source de revenus parallèle très lucrative. En contournant les librairies officielles, certains établissements maximisent leurs marges, au détriment du pouvoir d’achat des familles.
Le manque de contrôle effectif et l’impunité alimentent cette économie souterraine qui nuit à la régulation du marché du livre scolaire. Si quelques descentes de la brigade de contrôle du ministère du Commerce ont eu lieu ces dernières années, les sanctions restent rares. Dans la majorité des cas, les pratiques illégales reprennent peu après les contrôles, faute de poursuites sérieuses.
La complicité silencieuse de certains inspecteurs ou délégués aggrave le problème, installant une culture d’impunité qui fragilise les efforts de l’État. Pour mettre fin à ce business qui gangrène le système éducatif, il est urgent que la loi soit non seulement rappelée, mais effectivement appliquée.
Les associations de parents d’élèves, les syndicats d’enseignants et les librairies agréées doivent également jouer leur rôle de veille et de dénonciation. Car tant que ce commerce illégal prospérera dans les écoles, les principes d’équité, de transparence et de justice dans l’éducation resteront vains.
L’école ne doit pas être un centre de profits, mais un sanctuaire du savoir et de l’éthique.