Le 19 septembre 2025, la Commission des droits de l’homme du Cameroun (CDHC) a accusé réception d’une plainte déposée par l’Association pour la défense des droits des étudiants du Cameroun (ADDEC), dénonçant des cas répétés de harcèlement sexuel à l’université de Maroua.
Dans une lettre signée par son président, James Kobila Mouangue, la CDHC informe avoir saisi le recteur de l’université afin d’obtenir des éclaircissements sur les mesures prises, ou non, pour faire face au fléau du harcèlement sexuel au sein de l’institution universitaire. Ce n’est pas la première fois que le monde universitaire camerounais est pointé du doigt.
De l’Université de Yaoundé I à celle de Douala, en passant par Buea ou Ngaoundéré, les plaintes informelles s’accumulent depuis des années. Pourtant, dans la majorité des cas, aucune suite judiciaire ni administrative n’est donnée. La peur des représailles, la honte ou le manque de soutien institutionnel poussent les victimes au silence.
Le harcèlement sexuel en milieu universitaire s’inscrit dans un déséquilibre de pouvoir profond. Enseignants, encadreurs, chefs de départements ou directeurs de mémoires exploitent parfois leur position d’autorité pour obtenir des faveurs sexuelles en échange de notes, de stages ou de validations académiques. Une violence insidieuse, souvent banalisée.
Une réponse institutionnelle encore timide
La réaction de la CDHC, bien que tardive, marque un tournant symbolique. Elle reconnaît l’existence du phénomène et interpelle directement une institution universitaire. Mais cette prise de conscience reste largement insuffisante face à l’ampleur du problème. À ce jour, rares sont les universités camerounaises à disposer de dispositifs efficaces : pas de cellule d’écoute fonctionnelle, peu de comités d’éthique réellement actifs, et quasiment aucune ligne d’alerte confidentielle pour les victimes.
Pire encore, certains cas sont étouffés dans les couloirs administratifs pour préserver la réputation des établissements. Face à ce vide, l’ADDEC appelle à la mise en place urgente d’un mécanisme national de veille contre le harcèlement sexuel dans l’enseignement supérieur. Selon l’association, il ne s’agit plus seulement de réagir aux scandales, mais d’instaurer une culture de la prévention et de la tolérance zéro.
Le cas de l’université de Maroua pourrait bien faire office de catalyseur. Il met en lumière un mal systémique qui gangrène le milieu universitaire camerounais. Plus, encore, il oblige désormais les autorités académiques et politiques à sortir de l’inaction. L’université est un lieu de savoir et d’émancipation. Il ne peut rester un espace d’abus et d’impunité.