La 29ᵉ édition du festival Écrans Noirs a offert le 23 septembre 2025, un moment d’histoire avec la projection de Dahomey, documentaire de la réalisatrice franco-sénégalaise Mati Diop.
Présenté dans la salle du complexe de l’Université de Yaoundé I, l’œuvre revient sur le rapatriement, en 2021, de 26 trésors royaux béninois pillés par la France à l’époque coloniale. Le film débute dans le grand silence d’un musée à Paris. Dans une salle blanche, sous la lumière tamisée, reposent des objets royaux du royaume du Dahomey: des statues, des reliques, des trésors.
Parmi eux, une statue en bois anthropomorphe : le roi Ghézo. C’est elle qui va prendre la parole en voix off, dans la langue fon, non pas pour se plaindre, mais pour raconter : raconter son nom, puis l’oubli, puis le numéro que lui donna le musée. “Le 26”. Puis on rembobine le temps. On apprend que ces objets furent volés en 1892, quand les troupes coloniales françaises conquirent le Dahomey. Des palais, des rites, des symboles…tout fut emporté. Les objets, privés de leurs maîtres, de leur terre, «obligés de remplir le vide muet des vitrines parisiennes».
Puis arrive le moment du retour : en novembre 2021, 26 de ces trésors quittent Paris pour rejoindre le Bénin. Le chemin est long, méticuleux. Impressions de préparations, d’emballages, de douane, de transport. Chaque geste semble pesé, chargé d’histoire. Mais ce retour n’est pas anodin : le film donne voix aux citoyens, aux étudiants de l’Université d’Abomey-Calavi.
Certains ressentent une fierté «retrouvée», d’autres un questionnement : que signifie ce retour quand tant d’autres pièces restent encore hors de portée ? Quand des pans entiers de l’histoire ont été effacés ou ignorés dans l’enseignement ? Les objets arrivent, sont installés, exposés. Ils deviennent visibles. Ils redeviennent ce qu’ils étaient : symboles de pouvoir, de culture, de mémoire. On entend la voix du roi Ghézo, mais aussi celles des hommes et des femmes qui redécouvrent ces œuvres, qui les touchent, qui les regardent.
Le film ne se termine pas sur une simple célébration. Il laisse des zones d’ombre : les débats persistent, les attentes aussi. Car: « le retour n’est qu’une étape d’un long chemin vers la reconnaissance».