On les cache, on les montre, on les désire. Mais quand vient le moment de les utiliser pour ce à quoi la nature les a destinés, les sourcils se froncent. On crie au scandale lorsqu’une mère sort un sein en public pour nourrir son bébé, mais on détourne volontiers le regard quand c’est monsieur qui en profite dans l’intimité. Ironique, non ? Il faut croire que, avec le temps, les seins ont changé de propriétaire. Ils ne sont plus à la femme, encore moins à l’enfant. Ils sont devenus terrain de jeu pour adultes, argument de vente, outil de séduction, de marketing, de fantasme. Mais pour l’allaitement ?
Là, c’est un autre débat. Voyez-vous, l’image d’un bébé tétant un sein dérange car la poitrine pourrait faner. Celle d’un homme, en revanche, passe comme une lettre à la poste. Pendant ce temps, les bébés boivent du lait en poudre, les jeunes mères culpabilisent ou s’inquiètent pour leur silhouette. On a donc l’impression que les seins profitent surtout aux hommes, assurément, qui semblent garder le droit exclusif d’y toucher, même quand l’enfant a faim. À la société aussi, qui aime les exhiber mais pas pour nourrir. Et aux enfants ? À peine. À force de leur refuser le sein, on leur retire aussi un peu d’amour, de chaleur et surtout, de santé.