Ils commentent, débattent et partagent dans les groupes WhatsApp ou sur TikTok. Mais quand vient le moment de voter, beaucoup préfèrent s’abstenir.
Le 12 octobre 2025, des millions de Camerounais se rendront massivement dans les bureaux de vote pour élire celui ou celle qui incarne le mieux leur vision du pays. Sur la toile, les choix semblent déjà faits. Chaque camp a ses défenseurs, ses hashtags, et même ses créateurs de contenus. Mais entre les débats virtuels et le geste concret du vote, il y a un fossé.
La jeunesse semble bruyante en ligne, mais absente dans les urnes. « On en parle tous les jours sur TikTok, mais moi, je n’ai même pas ma carte d’électeur », avoue Claude, 24 ans. Sur son fil d’actualité, les vidéos politiques s’enchaînent : discours, meetings, appels à changer les choses.
L’engagement numérique, ici, se confond avec l’expression personnelle. « C’est notre manière d’exister, de dire qu’on est conscients », poursuit-il, conscient qu’il n’ira pas voter dimanche. Les réseaux sont devenus la nouvelle scène politique des jeunes Camerounais. Sur X, chacun devient analyste ou militant d’un jour.
Les messages fusent, les débats s’enflamment, les opinions s’affichent sans filtre. « Avant, il fallait forcément un regroupement physique pour se faire entendre. Aujourd’hui c’est plus simple. Tu fais une publication sur Facebook ou une bonne vidéo sur TikTok et c’est parti, tu peux toucher des milliers de personnes », note Christelle, 25 ans.
Mais cet engagement du bout des doigts ne se traduit pas toujours par une action réelle. Beaucoup évoquent la méfiance « Pour être honnête on fait ce qu’on peut sur internet pour faire comprendre que nous sommes aussi là. Mais la vérité est que, on milite pour militer, car on a parfois l’impression que les cartes sont déjà jouées » explique timidement Bertrand, 27 ans.
Pour d’autres, l’abstention n’est pas alors synonyme d’indifférence, mais de découragement. Ils observent, commentent, critiquent, sans croire que le vote puisse vraiment tout changer. Pourtant, cette génération reste attentive, informée, et connectée à son époque. Elle parle autrement, agit autrement, milite autrement. Les « militants du clic » ne sont peut-être pas si désengagés qu’on le pense. Leur engagement est plus diffus, plus numérique, parfois moins visible.
Ils transforment la politique en conversation, la contestation en contenu, et l’opinion en hashtag. Une autre manière d’exister dans l’espace public, en attendant, peut-être, de passer un jour du virtuel au réel.