La crèche d’aujourd’hui n’est plus tout à fait ce qu’elle était. Conçue autrefois comme un espace de douceur, de sécurité et d’éveil progressif, elle tend désormais à ressembler à une école en miniature. Et pour cause : à peine sortis du berceau, les enfants y sont plongés dans un environnement structuré, rythmé, codifié.
Derrière cette transformation, une réalité. De plus en plus de parents déposent leurs enfants à la crèche dès les premiers mois de vie. Ce choix, souvent dicté par des contraintes professionnelles, est aussi devenu un réflexe social. La crèche devient alors une réponse pratique, mais parfois aussi une manière déguisée de se délester d’une part du lien parental, comme si l’on confiait à d’autres la mission d’élever ou d’éduquer à sa place.
Dans certaines structures, les enfants suivent déjà des “activités pédagogiques” quasi scolaires : chant, motricité dirigée, reconnaissance des formes, des couleurs, des sons. On parle de “préparation à la maternelle” comme s’il fallait déjà performer. La spontanéité du jeu libre disparaît, remplacée par des programmes rigides. Mais que reste-t-il de l’enfance si on la presse dès le départ ? Un enfant n’a pas besoin d’objectifs. Il a besoin de temps, de câlins, de voix douces, de silences pleins de sens. La crèche devrait rester un cocon, non une machine de préformation.
À vouloir transformer la crèche en école avant l’heure, on prend le risque de priver les tout-petits de leur droit le plus fondamental : celui de grandir à leur rythme. Car l’enfance n’est pas un terrain d’accélération. C’est un espace de construction.