Dans plusieurs Instituts Privés d’Enseignement Supérieur à travers le pays, des constats alarmants émergent à la lumière de témoignages recueillis sur le terrain.
Derrière les brochures reluisantes, les slogans prometteurs et les vitrines numériques bien soignées, se cache parfois une réalité très sombre. Plusieurs Ipes affichent fièrement sur leur site internet ou dans leurs documents promotionnels des logos d’universités canadiennes, françaises ou américaines.
Pourtant, ces collaborations relèvent souvent de la pure invention. Fatoumata, étudiante en Licence professionnelle de Génie Informatique, raconte : « On nous a dit qu’on pourrait finir nos études au Canada, grâce à un partenariat avec une université de Montréal. Trois ans plus tard, on découvre que cette université n’a jamais entendu parler de notre école. » Il ne s’agit donc pas de simples malentendus, mais bien de fausses déclarations destinées à attirer des étudiants.
Autre pratique courante, l’annonce de bourses partielles ou totales pour les meilleurs élèves ou les plus démunis. Une promesse rarement tenue, selon plusieurs témoignages. Ali, ancien étudiant en gestion, explique : « Lors de mon inscription, on m’a assuré que j’aurais droit à une bourse de 50 % dès ma deuxième année, sous réserve de bons résultats. J’ai eu 15 de moyenne, mais on m’a dit que la bourse dépendait en réalité d’un quota budgétaire qui visiblement n’a jamais existé. » Derrière l’argument commercial de la « bourse d’excellence », il semble surtout y avoir une stratégie de recrutement agressive, déconnectée de toute réalité financière.
Dans certains établissements, les étudiants sont inscrits dans des filières qui manquent cruellement d’encadrement. Il n’est pas rare qu’un seul enseignant, parfois peu qualifié, couvre l’ensemble d’un programme de licence. Plus inquiétant encore, certaines filières ouvertes récemment n’ont aucun personnel enseignant permanent.
Des étudiants affirment avoir passé plusieurs semaines sans un seul cours, les enseignants recrutés à la dernière minute ayant abandonné leur poste. La plupart des Ipes imposent un stage obligatoire en fin de cycle. Mais sur le terrain, ils n’accompagnent pas les étudiants dans la quête des entreprises d’accueil. Faute de conventions solides avec des entreprises, les étudiants doivent eux-mêmes démarcher sans aucun soutien.
Pierre Ekoume, étudiant en marketing, confie : « On devait faire un stage de deux mois mais l’école ne nous a donné aucun contact. A nous de nous débrouiller, tout ce qu’ils attendent est un rapport de stage ». Certaines écoles vont jusqu’à accepter des rapports de stage fictifs sans poser de questions. Ce laxisme met en doute la crédibilité des diplômes délivrés. Malgré ces nombreuses failles, plusieurs de ces Ipes disposent d’un agrément ou d’une reconnaissance provisoire du ministère de l’Enseignement supérieur.
Mais selon un fonctionnaire ayant requis l’anonymat, « les contrôles sont trop rares et les moyens humains pour les inspections sont insuffisants. » Ce vide réglementaire permet à certains établissements de continuer leurs activités, au détriment de la qualité de l’enseignement et de l’avenir des étudiants. Ces constats, s’ils ne concernent pas l’ensemble des Ipes, révèlent toutefois un malaise structurel profond dans le secteur privé de l’enseignement supérieur.