Entre audace vestimentaire et influence digitale, les jeunes transforment les rues de la capitale en véritable podium.
Dans les rues de Yaoundé, l’air sent les vacances. De Mvog-Mbi à Bastos, en passant par Elig-Edzoa ou Essos, les trottoirs de la capitale se transforment en défilés de mode improvisés. Ici, les tendances sont assumées, parfois audacieuses, souvent influencées par les réseaux sociaux, mais toujours marquées par la volonté de se faire remarquer. Chez les filles, la robe moulante est reine. Qu’elle soit courte ou longue, unie ou imprimée, elle épouse les formes avec assurance. « On veut être fresh, stylée, et montrer qu’on est à l’aise dans notre peau », confie Christelle, 19 ans.
Elle complète son look avec des sandales à talons carrés et un petit sac à chaîne dorée. L’autre grande star des trottoirs c’est le pantalon cargo. Décliné en camouflage ou en couleurs sobres comme le beige et le noir, il fait fureur. Porté avec un drop top, le look devient à la fois décontracté et affirmé. Pour Nadia, étudiante, c’est un incontournable : « C’est pratique, confortable et tendance. Et surtout, ça va avec tout ! » Les garçons n’ont pas dit leur dernier mot. Les pantalons oversize, souvent très larges sont partout.
On les associe à de gros t-shirts floqués, inspirés des rappeurs américains. L’ensemble est parfois complété par un sac banane porté en travers du torse, des baskets montantes et surtout une coupe de cheveux bien travaillée. Sur les têtes masculines, la teinture noire brille. « C’est pour accentuer les tracés », explique Joël, coiffeur à Nkolndongo. En effet, les lignes sont nettes, les contours dessinés à la lame, et les jeunes n’hésitent pas à repasser chez le coiffeur chaque semaine pour garder une coupe impeccable. Certains ajoutent même une touche de couleur : mèches blondes, reflets rouges ou bleus sur les dreadlocks.
À travers les tenues, les jeunes expriment leur identité, leur créativité, et surtout leur liberté. « Pendant l’année, on est dans les uniformes. Là, on peut respirer un peu », lâche Kevin. Même les accessoires sont pensés. Les téléphones sont assortis aux tenues grâce à des coques flashy. Les ongles sont longs, carrés ou en amande, recouverts de strass ou de dessins colorés. Les piercings au nez ou à l’oreille sont de plus en plus fréquents, tout comme les colliers multirangs, bagues argentées et chaînes de cheville.
Mais au-delà de la simple apparence, ces choix vestimentaires révèlent aussi l’influence de la culture numérique. TikTok, Instagram, les clips de musiciens nigérians ou ivoiriens, les séries américaines ou coréennes inspirent fortement cette nouvelle génération. Et bien souvent, les photos prises dans ces looks finissent elles-mêmes sur les réseaux. Si certains adultes dénoncent une dérive vestimentaire ou une perte de repères, les jeunes, eux, assument.
Ils créent leur propre langage stylistique. Les vacances sont leur podium. Yaoundé, leur scène. Et leur style, un message sans équivoque : “Nous sommes là, et nous existons.” En attendant la rentrée, les rues de la capitale continueront de vibrer sous les couleurs, les coupes audacieuses et les pas assurés d’une jeunesse qui, par la mode, affirme sa présence et ses rêves.