D’après certains enseignants et parents, les manuels scolaires d’aujourd’hui ont moins de portée éducative que ceux des années antérieures. Ces derniers dénoncent un manque de profondeur pédagogique et une logique commerciale pointée du doigt.
En novembre 2018, le Conseil National d’Agrément des Manuels Scolaires et des Matériels Didactiques (CNAMSMD) a demandé le retrait du manuel « L’Excellence en Sciences » pour les classes de 5e, à cause de son module IV, intitulé Education à la santé, jugé inadapté pour les jeunes élèves. Le chapitre en question abordait de manière crue accompagné d’illustrations indécentes pour le jeune public auquel il est destiné des thèmes sensibles comme la zoophilie, l’inceste, l’homosexualité ou la pédophilie. Si le CNAMSMD justifie l’enseignement par la nécessité de répondre à une sexualité précoce constatée chez les adolescents, d’autres y voient une dérive vers des contenus mal encadrés, voire perturbants pour des élèves encore fragiles. Sur le plan physique, il existait ce que l’on appelait le « livre unique » : un seul ouvrage pour une matière, pour tous les niveaux scolaires.
Ce format avait l’avantage d’être économique et pratique. « Aujourd’hui, c’est la chasse à l’argent par les librairies, on change de livre chaque année sans savoir ce qu’il contient. A mon époque on utilisait les livres uniques de français et même de mathématiques ce qui donnais la possibilité à nos cadets de réutiliser », déclare Florent Essama, ancien enseignant de français. Aujourd’hui, chaque classe dispose de plusieurs manuels spécifiques à chaque matière et niveau. Ce changement, combiné au renouvellement fréquent des ouvrages, représente une charge financière pour les familles. « Le fait que les enfants ont plusieurs livres au programme est vraiment dur pour nous qui sommes parents. Moi par exemple, avec mes 5 enfants ce n’est pas évident.Auparavant c’était plus facile car il y avait les livres unique assigné à chaque classe », déplore Corine Mbida, parent d’élèves.
Malgré la cherté des manuels scolaire, certains parents se battent pour acheter l’essentiel des fournitures pour leurs enfants pour la rentrée scolaire prochaine. Les changements sont visibles. Il existe une différence de contenus entre les manuels d’hier et ceux d’aujourd’hui. Les anciens manuels offraient une qualité d’apprentissage, qui aujourd’hui a disparue. Ils privilégiaient des savoirs fondamentaux, structurés et rigoureusement sélectionnés. Ils avaient pour objectif de transmettre des connaissances, des repères culturels et des valeurs éducatives bien définies. Selon les parents, aujourd’hui, on observe une prolifération de manuels aux contenus inégalement rédigés, et marqués par des approches pédagogiques parfois trop théoriques
. « Lorsque je faisais la classe de 3e je ne faisais pas le cours de physique chimie car le professeur nous donnait le cours intégral du livre sans mettre un accent sur la pratique et moi à mon niveau j’étais pénalisé », explique Franchesca Ndema.Les anciens manuels scolaires, notamment ceux de grammaire et de conjugaison, étaient plus élaborés. Aujourd’hui, les livres se contentent de transmettre l’essentiel aux apprenants ; leurs contenus sont plus allégés. Certaines leçons ont été supprimées, car elles sont désormais jugées inadaptées au niveau de compréhension des enfants actuels. La recherche personnelle n’est plus considérée comme une compétence à développer. Par exemple, la deuxième forme du passé composé n’est même plus enseignée. « Autrefois, nous avions une grande quantité de matières à apprendre. Il fallait s’adapter et on se débrouillait à réussir notre année », confie Mbah MBiang, enseignant d’espagnol.